Le 15 octobre s’organisait à Bruxelles le colloque sur les multi-discriminations, point d’orgue d’un projet de plusieurs mois réunissant initialement autour de la table des membres de Why Me ?, association belge de demandeurs/euses d’asile LGBTQI, et des jeunes des CHEFF. Ce projet a aussi permis de donner vie à de nombreux outils d’information et de sensibilisation. Amélie, notre chargée de projets, a coordonné toutes les opérations et nous en dit quelques mots…
Coline : Tout d’abord, comment est né ce projet ?
Amélie : Fin 2014, début 2015, Albéric, président de Why Me ?, est venu à la rencontre des CHEFF avec en main une quarantaine de témoignages écrits de demandeurs/euses d’asile membres de son association. Il voulait sortir ces récits de l’ombre, les valoriser, les partager. Il s’est donc adressé à nous pour tisser un partenariat. On a trouvé cela intéressant de proposer aux jeunes des CHEFF d’entrer dans cette dynamique pour mieux découvrir cette réalité méconnue. Il y a eu des rencontres, des partages d’expériences et, au fil du temps, s’est construite l’idée de créer une exposition en ligne rassemblant ces témoignages.
À la première lecture de ces témoignages, qu’est-ce qui t’a spécialement marquée ?
J’ai été désagréablement étonnée par les questions du CGRA, par leur caractère intrusif. Notamment par la question « Quels étaient vos premiers attouchements sexuels et qu’est-ce que vous avez ressenti ? ». C’est choquant car c’est extrêmement indiscret et, le pire, c’est que la réponse n’est en aucun cas susceptible de donner une idée de l’orientation sexuelle de l’interviewé-e.
Ce que je retiens aussi, c’est la réalité du parcours de demandeur/euse d’asile, avec tout ce que cela a d’aléatoire : tout dépend sur quel-le employé-e du CGRA on tombe, car selon que la personne est très humaine ou très procédurière, cela peut tout changer. C’est aussi vrai pour le/la demandeur/se d’asile : certaines personnes comprennent vite ce qu’on attend d’elles, d’autres pas, et cela joue énormément sur l’issue du parcours. Ça se joue presque aux dés.
Ces questions du CGRA, vous les avez soumises à des passant-e-s dans un micro-trottoir…
Oui, en fin de projet, Jeunesse & Droit nous a rejoint-e-s et a créé cet outil. C’est l’occasion pour moi de dire que, tout au long du projet, on s’est adjoint l’expertise de partenaires divers car on n’avait pas toutes les compétences pour traiter de l’asile. Il y a eu la plate-forme Mineurs en exil, qui avait les compétences juridiques, Jeunesse & Droit déjà citée, qui s’est spécialisée dans la création d’outils de vulgarisation juridique, et enfin la Rainbowhouse, qui a fondé un groupe de sociabilisation de personnes réfugié-e-s LGBTQI, les Rainbow United. Pour en revenir au micro-trottoir, qui a été tourné dans les rues de Bruxelles, les réactions des passant-e-s sont éloquentes. Une dame en pleure même. Deux autres capsules vidéo ont été créées par Jeunesse & Droit et répondent aux questions techniques que se posaient les réfugié-e-s de Why Me ? de la manière la plus simple possible. L’exposition en ligne est accessible à l’adresse : https://sites.google.com/site/refugieeslgbtqibelgique/.
Quant aux capsules vidéo, il est possible de les visionner sur le site de Jeunesse & Droit : http://www.jdj.be/animations.php.
Enfin, il y a le jeu de l’oie ?
Oui. Le jeu de « loi », en fait. Ce jeu a été conçu sur base des témoignages du tout début. Dans les différents récits, plusieurs éléments concordaient ou étaient récurrents ; on les a repris dans le jeu de loi pour immerger le/la joueur/euse dans ce parcours du/de la demandeur/euse d’asile, dans ces réalités dont on n’a pas toujours conscience. Il s’agit vraiment de se mettre « dans la peau de », de vivre les choses subjectivement, et pas avec un regard « méta », l’objectif final étant la sensibilisation. Ce jeu existe physiquement et il est possible de se le procurer en adressant une demande aux CHEFF : info@lescheff.be.
Coline Leclercq
Les CHEFF asbl